Les ostéopathes parlent et écrivent du rôle de l’ostéopathie dans la prise en charge de la grippe depuis la pandémie dévastatrice de 1918-1919 de grippe espagnole, qui aurait affecté un milliard d’humains (à l’époque 50% de la population mondiale) et aurait tué 51 à 81 millions de personnes (62 millions selon un article de Murray, 2006). Le virus H1N1, d’origine aviaire, aurait muté au porc puis aux humains (Gibbs & Gibbs, 2006). A l’époque, les anti-biotiques avaient été découverts mais n’étaient pas encore utilisés. Ils auraient pu sauver énormément de malades, tués par les surinfections bactériennes suite à l’affaiblissement du système immunitaire par le virus.
Il y a énormément de littérature sur le sujet – certains auteurs soutiennent que l’étude de la pandémie de 1918 aide à mieux comprendre le fonctionnement et le mécanisme de transmission, afin de mieux se préparer à la prochaine pandémie. Rien que pour 2012 et selon ScienceDirect: 349 articles, pour 6009 résultats, dont 1391 dans The Lancet (revue à haut niveau de preuve). Les ostéopathes eux aussi, aiment parler de la grippe et de ce que nous pourrions faire, avec nos mains, pour lutter contre le virus potentiellement fatal.
Je rentrerai ici en détail dans l’article de Hruby et al (2006), car les auteurs exposent tout d’abord les résultats de leur revue de littérature, puis expliquent clairement les différentes techniques utilisées. Cet article datant de 2007, j’écrirai prochainement un nouveau billet avec les articles sur le sujet sortis récemment.
Les ostéopathes de 1918
L’association Ostéopathique Américaine a publié les chiffres reportés par les phyisiciens de 1918-1919, qui estimaient les taux de mortalité de leur patientèle, afin de faire des statistiques. Les physiciens ostéopathes rapportèrent des taux de mortalité bien en dessous de ceux des médecins conventionnels, notamment à Chicago et New York, pourtant des villes très densément peuplées et donc au plus fort taux de contamination. Hruby et al concluent donc qu’il est essentiel pour les ostéopathes d’être formés à la prise en charge de la grippe, d’être intégrés au système de soin et ainsi… de sauver le monde. Plus d’infos dans le n°19 de l’Ostéopathe Magazine, ou sur losteopathe.fr
D’ou viennent ces chiffres?
Ces chiffres sont tirés de publications de 1919 dans le JAOA, republiées en 2000 par cette même revue. Pour trouver ce texte, cliquer ici ou là pour un autre article. Les auteurs de l’époque expliquent qu’une étude a été menée suite à la pandémie, afin de connaître l’efficacité de la prise en charge ostéopathique. Ces chiffres montrent que les patients ont tout intérêt à consulter leur ostéopathe plutôt que leur médecin afin de survivre à la pandémie… Évidemment ces chiffres sont tout à fait discutables, la « recherche » de l’époque n’étant pas comparable à celle d’aujourd’hui – mais cela peut contribuer à décrédibiliser la recherche ostéopathique (voir ce billet en anglais sur un blog américain, qui rit de l’article de Hruby et des chiffres cités). Néanmoins, ce type d’article a permis aux ostéopathes et chercheurs modernes de se poser des questions sur la prise en charge ostéopathique de problématiques immunitaires avec de bons résultats (Noll et al et la pneumonie, 2003; ainsi que Hodge et son équipe qui publient actuellement des travaux passionnants, certainement discuté à l’occasion d’un prochain billet)
Techniques spécifiques
L’article de Hruby et al reporte une trentaine de techniques, dont une vingtaine utilisées par des ostéopathes en 1918 afin de répondre aux problématiques grippales. Les auteurs de ce texte affirment que les techniques ont été décrites par des ostéopathes « vintage » de l’époque… Difficile de le prouver, car les articles sont aujourd’hui difficiles à trouver, à comprendre et analyser. De plus, ces articles ne constituent pas des preuves scientifiques, mais plutôt historiques.
Pompage lymphatique thoracique rythmique (fig 1) environ 110 à 120 par minute.
Les praticiens ont la possibilité d’ajouter un recoil sternal (pression continue sur le sternum lors de l’inspiration, relâchement soudain) – fig 2
Pompage lymphatique hépatique (fig. 3 en décubitus dorsal et fig 4 et 5 en décubitus latéral avec vibration)
Pompage lymphatique splénique en décubitus dorsal (fig 6 et 7) et en décubitus latéral (fig 8 et 9)
Pompage lymphatique abdominal (fig 10) au rythme approximatif de 20 à 30 compressions par minutes.
Pompage lymphatique du membre inférieur (fig 11) dorsiflexion répétées, en laissant le corps onduler naturellement.
Rib raising – mobilisations costales rythmiques (fig 12 et fig 13)
Autres techniques ostéopathiques, non tirées de la littérature
Traction pectorale (fig 14)
Drainage et mobilisation de la mandibule (position assise – fig 15) traction médiale de la mandibule pendant 3 à 5 secondes, puis relâchement dans la position physiologique, pendant environ une minutes, en fonction du patient.
Drainage des sinus frontaux (fig 16) et maxillaires (fig 17)
Lift frontal (fig 18) de décongestion frontal
Lift maxillaire (fig 19) de décongestion des sinus maxillaires
Technique de diaphragme (fig 20)
Réflexes de Chapman, spécifique dans le traitement de la grippe (fig 21 et 22) et ses effets secondaires (à décrire)
Les auteurs décrivent ensuite d’autres techniques, en MET (technique d’énergie musculaire) et tissus mous. Au prochain épisode…
Hruby RJ, Hoffman KN. Avian influenza: an osteopathic component to treatment. Osteopathic Medicine and Primary Care 2007, 1:10
Article très intéressant qui me rappelle certains cours de MET… mais en VF cette fois-ci ! ;-)
ça fait toujours du bien de relire et revoir ces techniques ! Une petite piqûre de rappel très bénéfique donc !
J’attends la suite avec impatience ! :-)
Bonsoir,
je vois que nous avons réagi au même billet (sur EvidenceBasedMedicine, le MD qui n’aime pas l’OMT…). J’ai récemment décidé de mettre en place un ScoopIt de veille scientifique sur la recherche et l’ostéopathie, je pense que le contenu pourra parfois vous intéresser : http://www.scoop.it/t/recherche-scientifique-osteo
J’en profite pour vous renouveler mes compliments pour votre site et vos articles!
Bonne continuation
Un sujet épineux, surtout quand on voit écrit tout et son contraire.
Je pense qu’outre ces études qui commencent à dater et qui ne sont lues que par les spécialistes, le seul vrai comportement qui compte est celui du malade, et que ce dernier se tournera toujours plus vers son médecin traitant que vers son ostéo pour ce genre de pandémie.
@ Thibault M : bonne idée cette veille sur le sujet, merci pour cette nouvelle source